Du vol au kidnapping, le danger guette l’expatrié dans certains pays. ll faut alors connaître les règles de sécurité.

Dans le jargon des professionnels de la sécurité, on appelle cela la « golden hour » :ces minutes cruciales qui suivent le déclenchement d’une crise et durant lesquelles une action rapide peut sauver des vies. Méconnue du grand public, cette notion parle, en revanche, à nombre d’expatriés français présents dans des zones à risques. Acclimatés à un environnement ­potentiellement dangereux, ils ont intégré tout un vocabulaire de crise, évoquant par exemple au détour d’une phrase les « zones rouges », ces régions où il est « formellement déconseillé » de se rendre. Dans certains pays, ils ont pris des réflexes : toujours laisser quelques mètres entre sa voiture et le véhicule qui les précède au feu rouge, ou ne « jamais regarder un braqueur dans les yeux ».

« Etre expatrié, ce n’est pas se faire dorer au soleil sous les palmiers », résume Régine Prato. Loin de l’image d’Epinal du Français de l’étranger vivant dans une douce nonchalance, cette entrepreneuse installée en Egypte ­depuis trente-six ans décrit un quotidien où la vigilance est de mise : « On acquiert des automatismes au fil des ans. Dans la rue, par exemple, on ne porte jamais son sac du côté de la chaussée, pour ne pas se le faire arracher par un deux-roues ».

Dans de nombreuses zones du monde, les expatriés doivent ainsi respecter des règles strictes de sécurité. C’est le cas dans certains pays où le risque criminel est jugé élevé (la Colombie, par exemple). Et d’autant plus dans des zones connaissant de vives tensions internes (République démocratique du Congo…). Dans d’autres régions comme le Sahel, c’est la progression du risque islamiste qui appelle les Français à la plus grande vigilance.

Racket, vol, enlèvement… Pour prévenir ces dangers, toute une organisation s’est mise en place au fil des ans. En Egypte, le renforcement des mesures de sécurité date de la révolution de 2011. « Elle a ouvert une période d’insécurité d’un an et demi », rappelle Régine Prato, qui avait alors installé des protections en fer forgé aux fenêtres de son domicile. De leur côté, les représentations françaises ont divisé le pays et sa capitale, Le Caire, en différentes zones, et placé des « îlotiers » à leur tête, dont Régine Prato.

Consignes d’évacuation

« Nous possédons la liste des Français présents dans notre zone et pouvons relayer les informations sécuritaires », explique-t-elle. Elle dispose également de moyens de communication spécifiques lui garantissant une relation continue avec le poste de garde de l’ambassade de France. « Il est ­important d’avoir des capacités de communication, au moins locale, entre Français [par exemple par réseau satellitaire], confirme François Barry Delongchamps, président de l’Union des Français de l’étranger. Cela peut se révéler précieux lors d’une crise où ­l’électricité ou les réseaux téléphoniques traditionnels viendraient à manquer. »

L’un des enjeux centraux de ce maillage est, bien sûr, de pouvoir localiser le plus rapidement ­possible les Français présents en cas de problème majeur afin de leur transmettre des consignes et, dans le pire des scénarios, de procéder à leur évacuation. « Nous avions un système très efficace en 2004, en Côte d’Ivoire, se souvient François Barry Delongchamps. Lors d’émeutes au cours desquelles nos ressortissants étaient menacés, nous avons pu mobiliser la communauté française en une demi-heure et lui indiquer la marche à suivre. »

Souvent regroupés au sein d’un réseau identifié, les expatriés sont par ailleurs, pour beaucoup, acculturés : ils connaissent le pays et ses risques. « On ne va pas faire du vélo au milieu du Chiapas ! », note ainsi, depuis Mexico, Gérard Signoret. Ce responsable d’une chaîne de restaurants le reconnaît toutefois : la prudence ne permet pas d’éviter tous les risques. « Il ne faut pas se trouver au mauvais endroit au mauvais moment », convient-il avec une pointe de fatalité. Certaines de ses connaissances se sont déjà fait braquer. Il assure, par ailleurs, que des commerçants sont régulièrement victimes de racket, des criminels leur imposant « le versement d’une somme pour que leur entreprise ait le droit d’exister ». Des faits parfaitement intégrés (« cela fait partie de la vie ici », glisse-t-il) et qui ne l’empêchent pas de voir le Mexique comme un « beau pays plein d’opportunités ».

Face à l’évolution des risques et à la multiplication des zones de tension, les entreprises françaises se sont, elles aussi, organisées. Beaucoup ont mis en place des services dédiés avec, parfois, une direction sûreté pour chaque grande région du monde. Elles peuvent s’attacher les services de gradés de l’armée à la retraite ou d’anciens policiers.

STRATÉGIES SÉCURITAIRES : FAIRE PROFIL BAS, S’HABILLER AVEC DISCRÉTION, SE DÉPLACER AVEC UNE ESCORTE…

Les questions sécuritaires peuvent aussi être externalisées, des sociétés proposant toute une gamme de services d’accompagnement des expatriés. Cela passe par des actions de prévention en amont afin de sensibiliser les partants aux risques et leur donner quelques consignes (faire profil bas, s’habiller discrètement…). Les collaborateurs sont ainsi « acclimatés », se faisant par exemple à l’idée qu’ils auront une escorte armée s’ils se déplacent en voiture dans certaines zones, comme à Lagos, au Nigeria. « On nous demande de plus en plus de mener ce type d’action de prévention, indique Xavier Carn, vice-président sécurité Europe Middle East & Africa d’International SOS. C’est notamment dû à l’évolution de la jurisprudence mondiale qui fait peser de lourdes responsabilités sur l’employeur en termes de prévention, de préparation des collaborateurs et d’assistance. »

Sur place, toute une logistique peut être déployée pour s’assurer de la sécurité des salariés. « Les entreprises veulent pouvoir localiser rapidement leurs collaborateurs en cas de crise », avance Xavier Carn. La multiplication des plans d’action élaborés pour mettre les salariés en sécurité témoigne d’ailleurs de l’inquiétude croissante face aux tensions. En Corée du Sud, par exemple, « beaucoup d’entreprises nous ont demandé à l’automne dernier de réaliser des “plans d’escalade” leur présentant différents scénarios de crise ».

Source : LE MONDE | 05.06.2018 à 06h30 |Par François Desnoyers

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